Véranda sur parties communes à jouissance privative et prescription
La prescription de l'action du syndicat en démolition d'une construction sur parties communes en jouissance privative
La construction d’une véranda sur les terrasse et loggia dont la SCI avait la jouissance privative peut caractériser un acte d'appropriation de ces parties communes, et être soumis à la prescription trentenaire.
Cour de cassation, 3e chambre civile, 22 Octobre 2020 – n° 19-12.588
Faits et procédure
Selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 10 janvier 2019), la SCI Saint-Gelais (la SCI) est propriétaire, dans l'ensemble immobilier Le Grand Foc soumis au statut de la copropriété, d'un lot auquel est attaché le droit d'usage privatif d’une terrasse et d’une loggia. Le syndicat des copropriétaires de cet ensemble immobilier (le syndicat) a assigné la SCI en démolition des vérandas et des installations de fermeture et de couverture mises en place par celle-ci sur ces espaces extérieurs et en remise en état.
Réponse de la Cour
Vu l’article 2227 du code civil :
Selon ce texte, le droit de propriété est imprescriptible ; sous cette réserve, les actions réelles immobilières se prescrivent par trente ans à compter du jour où le titulaire d'un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l'exercer.
Pour déclarer irrecevable la demande, l’arrêt retient que le syndicat ne peut soutenir que la SCI Saint Gelais s'est appropriée les terrasse et loggia, parties communes à usage privatif, puisqu’elle en a un usage exclusif, que l'action du syndicat est une action personnelle et que le délai de prescription applicable est celui édicté par l'article 42 de la loi du 10 juillet 1965.
En se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si la construction d’une véranda sur les terrasse et loggia dont la SCI avait la jouissance privative ne caractérisait pas un acte d'appropriation de ces parties communes, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision.
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur l’autre grief, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 janvier 2019, entre les parties, par la cour d'appel d’Aix-en-Provence ;
Note : Cette décision n’est pas isolée et est le pendant de la reconnaissance de plus en plus large de l’usucapion sur des parties communes.
La Cour de cassation approuve la cour d’appel qui a retenu à bon droit qu’un droit de jouissance privatif sur des parties communes est un droit réel et perpétuel qui peut s’acquérir par usucapion et qu’un tel droit peut avoir pour objet l’apposition d’enseignes sur les parties communes de la copropriété.
Elle a constaté que la pose d’enseignes en imposte sur les portes cochères n’avait pas été autorisée par l’assemblée générale et que le règlement de copropriété ne contenait aucune stipulation sur ce point.
Elle a relevé que la société Van C. avait apposé les enseignes depuis 1964, voire 1953, et avait manifesté, depuis lors, son intention de se comporter en titulaire exclusif du droit de les poser.
Elle en a souverainement déduit, sans qu’il y ait lieu de caractériser une acceptation expresse des copropriétaires, qu’il ne s’agissait pas d’une simple tolérance des autres copropriétaires, mais que cette société, ayant accompli, sans interruption depuis plus de trente ans, des actes caractérisant une possession continue, ininterrompue, paisible, publique et non équivoque, avait acquis, par usucapion, un droit de jouissance privatif réel et perpétuel au maintien des enseignes.
Le moyen n’est donc pas fondé.
Cour de cassation, 3e chambre civile, 22 Octobre 2020 – n° 19-21.732
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